Parler et nommer le "4ème trimestre" est un défi sociétal majeur auquel les entreprises doivent prendre part

Par Charlotte POUYET 22 Jui 2023
Parler et nommer le "4ème trimestre" est un défi sociétal majeur auquel les entreprises doivent prendre part

Aujourd'hui, je voudrais vous parler d'un livre. "Le 4ème trimestre de la grossesse" d'Ingrid Bayot.

Un livre à mettre entre toutes les mains des futures/jeunes mères et des coparents.

Ce livre est à mettre entre les mains de toutes ceux et celles qui s'intéressent de près ou de loin à ce qui se joue pour la femme et le coparent après l'accouchement. Un livre à lire si l'on est dirigeant, dirigeante, manager ou manageuse, collaborateur ou collaboratrice en entreprise, côtoyant de près ou de loin de jeunes parents. Bref, c'est à dire à peu près tout le monde. Car "le monde de l'entreprise" peut mieux faire. Pour mieux soutenir la jeune mère et le coparent. Vu le temps passé au travail, c'est une nécessité si l'on veut faire bouger les lignes.

L'impact des contextes sociétaux sur la mère est énorme. Car notre société ne réalise pas les enjeux essentiels qui se jouent dans les semaines qui suivent la naissance. Souvent, la pression sociétale (discours, modèles d'identification, représentations et croyances, soins, soutiens...) ne permettent pas d'encourager l'engagement parental.

La parentalité est une naissance, un "nouveau moi", un cheminement vers un nouvel équilibre

Malheureusement notre société prône et pousse vers un retour à deux dynamiques aux antipodes des réalités de l'après-naissance : la séduction et la productivité. Car que se passe t-il après le miracle de la vie, celui d'avoir donné naissance ? Quel temps laissons-nous aux jeunes mères pour se (re)trouver, se découvrir, prendre le temps d'apprendre, essayer parfois tant bien que mal de trouver un village, une tribu soutenante qui n'existe bien souvent plus aujourd'hui ? Et quel temps laissons-nous aux coparents pour construire, participer activement, trouver leur place ? Si la réponse est "2 mois et demi" en moyenne pour la jeune mère et 28 jours pour le coparent, alors elle n'est pas suffisante.

Notre rapport à la maternité est influencé par notre patrimoine historique

Le non maternage était un signe d'ascension sociale durant l'époque moderne, de la fin du Moyen Age jusqu'au XIXème siècle. Dans les classes dominantes, les femmes usaient de stratégies variées pour échapper aux "devoirs" autour de l'accueil du nourrisson. Ces siècles nous influencent encore beaucoup dans notre rapport à la maternité. Aussi, notre puériculture occidentale est née non pas dans les familles, en observant des bébés proches de leurs parents, mais essentiellement dans les collectivités, avec (au départ), soins en série, horaires de repas et substituts du lait maternel. Ces héritages historico-socio-culturels créent des représentations de la féminité et de la maternité. Ils peuvent être remaniés quand ils sont vus et nommés. Ils peuvent être remaniés quand des évolutions sociales surgissent aussi en entreprise, quand un plan de "Qualité de Vie au Travail" tient compte des enjeux autour de la parentalité et permettent de questionner l' équilibre vie pro/vie perso.

Un décalage qui cause du tord aux jeunes parents

 

il existe un décalage aujourd'hui entre la promotion de certaines pratiques (allaitement, maternage proximal, éducation positive...) et le manque d'accompagnement des parents pour leur mise en place. Car dire que le nouveau-né a besoin de proximité avec sa mère c'est bien mais se demander de quoi sa mère aurait besoin pour parvenir à se sentir suffisamment bien, suffisamment bonne et soutenue, cela serait encore mieux. Et sur ce point, on peut encore mieux faire.

Nous sommes des êtres sociaux, des êtres de langage. Ingrid Bayot l'explique bien : quand, dans une culture donnée, un phénomène, une période, un processus n'est pas nommé ou insuffisamment nommé, il reste dans le non-pensé, Le non-pensable. Alors nommons, faisons de la place à. Pour faire bouger les lignes...

Et le monde de l'entreprise ne doit pas y échapper.